Salut à toi @Sh1mn, je fais suite à notre discussion IRL de ce we à Bastille et à notre échange dans Cesium. J’en profite pour évoquer au passage tous les fils qui discutent sur la « valeur de la June », le « lien au temps », etc… ravi de constater que les réflexions mûrissent et abordent de plus en plus le sujet clé : l’économie. Ce que je qualifie souvent de « passer la seconde ».
Je constate que souvent, les propos tendent à vouloir changer le « système » tel qu’il est, que ce soit dans un registre économique ou plus politique. C’est le propos des économistes, ainsi Yoland Bresson avec son revenu d’existence, ou encore Bernard Friot avec son salaire à vie sur qualification, et tous les autres. Merci d’ailleurs @Gullandes de partager avec nous tes ressources de vieux militant, j’adore. Toutes leurs idées et leurs réflexions sont extrêmement enrichissantes, les plus intéressantes opèrent souvent des bouleversements culturels, mais elles reposent - toutes - sur la décision politique de nos gouvernements. Pour le dire simplement et rapidement, cette décision ne nous est aucunement accessible. Nous ne pouvons à notre échelle, ni changer notre système politique, ni changer l’économie qui nous régit.
Aujourd’hui grâce à la TRM et la première monnaie libre que nous expérimentons (merci encore @Galuel et @tous-les-devs), nous avons en revanche une opportunité totalement inédite, celle non pas de changer l’Economie, mais celle de créer une économie.
Je l’appelle économie X pour ne pas avoir à la nommer. Une économie « libre » n’aurait aucun sens, si ce n’est celui que lui donneraient nos émotions. Une économie n’est jamais « libre ».
Toutes les velléités d’une économie plus juste, plus équitable, d’un revenu de subsistance et ses variantes sémantiques multiples, ou toute autre aspiration de société plus « belle », ne dépendent pas de notre monnaie, toute libre soit-elle, mais sur cette économie X, ou ces économies, que nous créerons.
Pour la première fois dans l’histoire, cette possibilité de créer une économie X n’est pas un simple vœux pieux, elle est une réalité, car pour la première fois nous en avons - à notre échelle - le pouvoir requis, celui de la création monétaire.
Mais à ce jour, une fois comprises la TRM et ses propriétés remarquables, tout reste à faire. Ou plus exactement tout commence.
Le second pouvoir que nous donne cette monnaie est celui d’une mesure universelle. Le DU est, avant tout, cette unité de compte invariante. Je suis toujours intrigué de voir le volume de réflexions qui portent sur la « valeur de notre monnaie », alors que c’est elle - notre DU - qui nous permet de mesurer la valeur de toute chose, c’est sa vocation. C’est pour donner à cette unité de compte une parfaite symétrie spatiale et temporelle, la fameuse, que nous produisons nous-mêmes, chacun(e), cette unité de compte. La recherche par Stéphane de cet invariant mettait en perspective le fait que la seule personne légitime pour estimer ce qui est valeur ou ce qui ne l’est pas, et à quelle hauteur, c’est soi-même. Difficile de concevoir un champ plus relativiste que celui-ci, autant de référentiels que d’êtres humains sur la planète. Donc, la seule valeur - immuable - de notre DU, c’est celle d’être l’unité, pour mesurer tout le reste.
Nous sommes ainsi - tous - au centre de l’estimation des valeurs. Problème, … c’est un total bouleversement culturel. On a l’habitude de « consommer des prix », pas de les concevoir. Problème ou aubaine ? Ce qui nous bloque, c’est avant tout … des habitudes, et pour beaucoup de devoir faire quelques calculs.
Quand tu dis que « ça ne tient pas debout », ne soit pas « désolé » car tu ne parles plus du code monétaire ; ce n’est pas la monnaie elle-même, c’est notre économie X qui ne tient pas debout. Et pour cause, si elle n’est plus un embryon (il y a eu naissance), elle est encore un nourrisson. Le fait que les prix soient trop élevés - dans la plupart des échanges - est un phénomène de genèse, qui reflète plusieurs choses.
Le biais le plus important repose sur le manque de valeurs produites. Comme il y a très peu de valeurs produites dans notre économie X, nous avons tendance à donner beaucoup (trop) de valeur à tout produit. Mais cette tendance est aussi une envie, voire un besoin, tout à fait louable et légitime.
Un autre biais est celui du « mimétisme », nous tendons naturellement à nous rapprocher des ordres de grandeurs chiffrés en euros, même ceux qui sont le plus attachés à rompre toute relation avec l’euro dans leurs Ğ(libre)échanges. Qui oserait aujourd’hui afficher des prix en fractions de DU, avec des centièmes voire des millièmes, parce qu’il y a moins de 10.000 DUs dans son bassin de vie de 30.000 personnes ?
Autre biais de genèse, et j’arrête là car il y en a beaucoup, est la disparité des « masses monétaires », non seulement entre différentes régions, différents bassins de vie, donc différentes zones éco de proximité, mais aussi entre individus. On le constate en traversant tout le pays, on a pu le constater de façon flagrante - et poignante - à l’université d’été avec les espagnols. Or pour l’instant cette disparité n’a aucune corrélation avec l’économie de sa zone, ni avec les valeurs produites par les individus.
Les raisonnements, qui reposent implicitement sur des dynamiques de zone éco mures, sont fatalement erronés.
Aujourd’hui comparer une zone euro en « fin de vie » et une zone DUĞ1 qui fait ses premiers pas a-t-il vraiment un sens ? Comment peux-tu t’étonner que « tout le monde » navigue encore entièrement dans le référentiel qui l’a régi toute sa vie ? Il ne peut en être autrement à ce jour. Sur la route de la monnaie libre, je n’ai rencontré qu’une personne qui a choisi et fait la démarche de quitter radicalement toute UNL et clore tout compte bancaire. Cet homme a précédemment travaillé dans les finances (ironie du sort), il a mis 10 ans pour s’affranchir de tout. Respect, @Hdsa.
Le troisième pouvoir est la possibilité de changer de référentiel. Cela signifie davantage que simplement « sortir du référentiel euro ». Or pour estimer toute valeur dans un référentiel relativiste, nous avons tous besoin de faire un « saut périlleux », de nous entraîner, et je crois, tous besoin d’aide. J’évalue un prix relativement à quoi ? à la masse monétaire de ma zone ? à la masse monétaire créée non gagnée par l’acheteur ? à l’équivalence 15% du PIB X (en DUs) de ma zone ? …
Tu réfléchis à concevoir des outils pour « réguler » les prix à la baisse ; @francoislibre réfléchit à concevoir des outils d’analyse des transactions ; … super initiatives car elles pensent l’économie. Peut-être serait-il plus cool, utile et opportun, d’orienter ces réflexions et initiatives pour nous aider à franchir le cap de l’estimation relativiste des valeurs. Tu ne crois pas ?
Réfléchir collectivement sur des indicateurs et des outils pédagogiques d’aide à l’évaluation, par exemple inspirés par la magique « valeur médiane » et des calculs de probabilité bayésiens, seraient selon moi beaucoup plus créatifs et inspirants que des volontés de régulations, ou des désirs de toute autre « gouvernance morale »
A bientôt